Mort inattendue d’un nourrisson, apport de l’expertise toxicologique : à propos d’un cas

Archive ouverte

Mernissi, Touria | Cuvélier, Céline | André, Camille | Bodeau, Sandra | Bennis, Youssef | Masmoudi, Kamel | Quinton-Bouvier, Marie-Charlotte | Duvauchelle, Bénédicte | Lelièvre, Coralie | Decourcelle, Marie | Manaouil, Cécile | Hurtel-Lemaire, Anne-Sophie

Edité par CCSD ; Elsevier -

International audience. ObjectifsDocumenter une exposition à des stupéfiants dans un contexte de mort inattendue du nourrisson (MIN).MéthodeUn nourrisson de deux mois ayant pour antécédent une hospitalisation pour syndrome de sevrage à la naissance est retrouvé inanimé à domicile. Malgré les tentatives de réanimation, le décès est annoncé et le diagnostic de MIN est évoqué. Devant un contexte d’accident de la voie publique de l’enfant avec ses parents six jours avant le décès, un obstacle médicolégal est posé menant à la demande d’une autopsie et d’une expertise toxicologique de référence. Cette dernière inclut classiquement le dosage sanguin des alcools par HS-GC-FID, un criblage large recherchant médicaments et stupéfiants par LC-MS/MS ainsi qu’une quantification des molécules retrouvées par LC-MS/MS. À l’issue des premiers résultats toxicologiques rendus pour l’enfant, une enquête préliminaire est ouverte pour investigations complémentaires. Des prélèvements biologiques réalisés chez la mère ainsi que des objets saisis au domicile (2 biberons, 2 tétines, 1 boite de lait maternisé) sont également transmis au laboratoire pour analyse toxicologique.RésultatsLes méthodes de dosage utilisées n’ont mis en évidence ni médicaments ni alcools dans les prélèvements de l’enfant ou de sa mère. En revanche, il a été retrouvé des stupéfiants de la famille des cocaïniques et des morphiniques dans le sang et les urines de l’enfant. Les concentrations sanguines mesurées étaient respectivement de 44,8 ng/mL, 120,8 ng/mL et 50,8 ng/mL pour la cocaïne, la BZE et l’EME. Quant aux dérivés morphiniques, les concentrations sanguines de morphine et de codéine libres étaient inférieures à 10 et à 5 ng/mL, respectivement. Les analyses réalisées sur les prélèvements sanguins de la mère ont mis en évidence du THC (0,71 ng/mL), du 11-OH-THC (0,58 ng/mL), du THC-COOH (8,23 ng/mL), de l’amphétamine (8,1 ng/mL) et de la morphine libre (15,1 ng/mL). Les analyses urinaires ont montré la présence de THC-COOH (1,51 ng/mL), d’amphétamine (900,1 ng/mL), de morphine libre (1301,5 ng/mL), de codéine libre (139,3 ng/mL), de 6-MAM (81,8 ng/mL) en faveur d’une consommation d’héroïne, de cocaïne (18,8 ng/mL), de BZE (264,8 ng/mL), d’EME (5,8 ng/mL), de méthadone (5,8 ng/mL) et d’EDDP (13,7 ng/mL). L’analyse toxicologique pratiquée sur les objets a permis d’identifier la cocaïne, la BZE, la 6-MAM et la morphine (obtenues par hydrolyse) sur la surface extérieure des 2 biberons, des 2 tétines ainsi que celle de la boite de lait et de révéler des concentrations de 11,1 et < 5 ng/mL de BZE, de 716 et 177 ng/mL de cocaïne, de 19,8 et 23,5 ng/mL d’héroïne, de 66,3 et 6,6 ng/mL de 6-MAM, de 101,7 et < 5 ng/mL de morphine et de 11,4 et < 5 ng/mL de codéine dans le lait contenu dans les 2 biberons. Aucun stupéfiant n’a été identifié dans la poudre de lait.ConclusionConnue pour des antécédents de toxicomanie, les analyses toxicologiques réalisées chez la mère montrent qu’elle était sous l’emprise des stupéfiants au moment du prélèvement réalisé 14 jours après le décès de son bébé. Quant à celui-ci, l’autopsie et les examens anatomopathologiques n’ont pas montré de cause évidente de décès. Cependant, la présence de cocaïne et de ses métabolites ainsi que celle de la morphine et de la codéine dans le sang confirme une exposition systémique. L’enfant n’étant pas allaité, ces substances ont vraisemblablement été apportées par le lait et les tétines contaminés. Cette situation de maltraitance chimique par négligence, qui jusqu’ici est passée inaperçue, a favorisé la survenue du décès. Toutefois, d’autres facteurs tels que le tabagisme passif, le couchage inadapté, les causes infectieuses ou métaboliques ainsi que les antécédents médicaux doivent encore être explorés. Ce cas souligne l’importance de l’expertise toxicologique systématique dans l’identification des causes de la MIN.

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